jeudi 30 mars 2017

Finalité (Purpose)

On pose souvent la question: ”Quelle est la finalité, ou le but (ultime), de la vie?” La réponse à cette question, comme la réponse à la question concernant la finalité de n’importe quel object de la réalité, dépend du rôle ontologique du concept finalité. Dans l’ontologie PSSP, finalité est un des quatre attributs de tout object PSSP comme manifeste le premier P du sigle. Quand j’exposait mon ontologie PSSP à la communauté scientifique, le rôle central de finalité, même son inclusion parmi des concepts ontologiques, suscitait l’embarras. À l’époque, la pensée générale était que l’object dont l’existence est indépendante de l’homme, appelé object naturel, ne peut avoir que la structure et l’état (la fonction). Ainsi cette autre P (performance) était également vue obscure. 

Pour les artéfacts s’associant à la conception, la situation est différente. Normalement la spécification soit de la finalité soit de la performance de l’artéfact est le point de départ de conception. L’activité de conception, étant aussi l’object PSSP, a comme sa propre finalité la spécification d’une telle structure pour l’artéfact que la fonction de cet artéfact satisferait sa finalité. Le niveau de satisfaction sera manifesté par la performance de l’artéfact. S’il apparait que l’artéfact ne fonctionne pas comme il faudrait par les critères spécifiées sous sa finalité, c’est normalement la structure qui doit être révisée. Si on ne trouve pas de structure qui pourrait rendre la performance acceptable ou si aucune révision potentielle n’est justifiée par exemple pour des motifs économiques, il est encore possible de modifier la finalité de l’artéfact. Cette dernière est la procédure utile dans le recyclage et la gestion des déchets: l’artéfact qui n’est plus acceptable pour sa finalité d’origine peut continuer sa vie pour une nouvelle finalité qui lui donne une nouvelle identité.

L’ontologie PSSP est adéquate et ainsi holistique. Ça tient que la réalité est indivisible et que toute sa division n’est que le résultat des efforts de l’homme pour la rendre intelligible. Sur le plus haut niveau, la réalité est un unique object spatio-temporel qui représente tout ce qu’il y a. Il est composé de deux objects primitives qui sont inséparables, c’est à dire, qu’ils n’existent pas l’un sans l’autre et peuvent être compris comme deux projections d’une même chose. Les projections sont dans dimensions espace et temps. Je les ai nommé médium et événement. Les deux sont des objects PSSP. L’état de médium est la cause des changes dans l’état d’événement, et l’état d’événement est la cause des changes dans l’état de médium. Cette causalité réciproque ne disparaitra qu’au moment où la réalité est en stagnation totale. L’état où rien ne se passe signifie qu’il n’existe plus de cause pour ça: alors la distance spatiale dans le médium n’aurait plus d’importance, le temps serait disparu et la réalité serait en état semblable de celle-là qui prévalait avant le big bang.

Maintenant je veux retourner à la question concernant la finalité de l’object naturel. Si l’object naturel puisse se définir comme l’opposite de l’artéfact, peut-on définir l’artéfact? Si l’artéfact est le produit de conception, c’est seulement l’homme qui soit capable de le produire. En effet, c’est justement la définition qui se trouve dans TLFi, accompagné par ”Produit de l'art, de l’industrie” et une citation assurante: ”La distinction entre objets artificiels et objets naturels paraît à chacun de nous immédiate et sans ambiguïté. Rocher, montagne, fleuve ou nuage sont des objets naturels; un couteau, un mouchoir, une automobile, sont des objets artificiels, des artefacts.” Mais que peut-on dire des nids d’oiseaux ou des fourmilières? Sont-ils des objects naturels malgré l'homme n’a aucune difficulté de spécifier leur finalité. Et comment classifier le produit de l’art face à laquelle le public est complètement perplexe sans pouvoir de comprendre sa finalité. Est-ce que ce produit est plutôt un object naturel qu’un artéfact surtout si les ”experts” rassurent qu’on ne peut pas et ne doit pas essayer de le comprendre, et possiblement s’il est apparent que le processus de création n’était pas précédé par la phase de conception?

Si on proposait la division de la réalité en deux, aux objects naturels et aux artéfacts, la proposition se baserait sur l’exigence que touts les attributs en entités fondamentales de l’ontologie soient déterminables. Étant le plus évoluée et complexe espèce de la biosphère de la planète l’homme s’incline facilement à l’égoïsme. Il oublie que l’humanité n’est q’une fraction minuscule de la réalité si on prend en considération les dimensions spatiales et temporelles de la réalité. Surtout, telle division serait injustifiable dans le cas où la finalité de l’ontologie est de représenter la réalité en format unifiant. Cette finalité seule suffit pour maintenir la liste des quatre attributs. Alors, l’homme doit accepter le fait qu’il y a des objects dont quelques attributs lui restent indéterminables 

En effet n’importe quel object naturel est artéfact potentiel. La finalité d’un corps céleste peut être spécifié par l’homme tant qu’il fonctionnera en une base pour la sonde. La finalité d’un ver pour le merle est de fonctionner en son nourriture. C’est le merle qui a fait cette spécification par expérience et le rôle de l’homme qui l’observe n’est qu’être d’accord. L’homme a du mal à comprendre la finalité des moustiques mais la chauve-souris sait mieux. 

Et la finalité de l’homme même? L’homme est pure object naturel au moment de sa naissance. Il n’est pas une construction de ses parents. Sa formation vers un artéfact commence pourtant assez vite après ça. Il assume de divers finalités et identités au fil de sa vie, mais son identité en object naturel ne disparait pas. C’est justement cette dernière qui le fait de temps en temps demander après la finalité de sa vie. Voici la réponse générique: la finalité est que l'homme aurait la structure qui lui assurerait la capacité de fonctionner en interaction avec son environnement variant avec la performance maximale évalué par les critères qu’il assume. La même réponse est valide pour touts les objects.




lundi 27 mars 2017

Complexité

”La réalité est complexe.” Cette phrase a l’air d’une déclaration d’une trivialité dont il est facile, intuitivement et superficiellement, d’être d’accord. Mais elle peut représenter aussi le point de départ d’une révolution scientifique, le plus profond jamais, qui nous mène vers un nouveau paradigme de toute science et en conséquence vers une nouvelle vue du monde. Cette dernière est le scénario que je veux brièvement examiner. Que désigne-t-on par les termes réalité et complexe ici?

Commençons par la complexité. Complexe peut se confondre avec compliqué. Par exemple, le langage de spécialiste peut être compliqué aux profanes en sens d’être inintelligible. Le public peut trouver la musique contemporaine ou moderne trop compliqué pour en saisir son idée. Beaucoup de vieillards trouvent l’utilisation des moyens modernes de communication trop compliquée pour eux. Dans toutes ces phrases le terme compliqué exprime une impression subjective. Le terme complexité a été récemment choisi par des chercheurs pour désigner la propriété intrinsèque de la réalité indépendant de ce que l’homme en pense. Il sert ainsi de la démarcation entre la réalité et sa modèle formelle qui est incapable de capturer toutes ses propriétés. 

Attribuant le terme complexité à la réalité ne spécifie pas encore la signification des termes complexité et complexe. Pour la rendre explicite on est obligé de plonger dans les profondeurs de la réalité. J’utilise le terme réalité dans le sens ”tout ce qui est”, c’est à dire la totalité pour laquelle on utilise aussi des termes univers ou monde. Ainsi, tout ce que je vais dire concernant de la réalité est une prise de position ontologique et il s’agit alors, par nécessité, de l’ontologie adéquate opposée des ”ontologies” des domaines spécifiques. Il est important de comprendre que la réalité comprend aussi nos pensées en tant que produits de notre corps (embodied mind) quoiqu’ils demeurent en dedans du corps.

Ça fait presqu’une trentaine d’années que le terme ”science of complexity” apparaissait dans la littérature scientifique américaine. Ca peut être pris, si on veut, pour le premier signe de la volonté de poursuivre un nouveau paradigme, mais alors le contenu de ce terme n’était pas spécifié de façon précise. Un essai de le faire était publié dans l’editorial du numéro 38 de La Lettre Chemin Faisant en 2001. Selon ce qui était proposé, la science de la complexité ”ne peut caractériser une discipline scientifique parmi d’autres, et nulle discipline ne saurait s’en attribuer la propriété épistémique. L’intelligence de la complexité, les modes de représentations et d’interprétations pour action qu’elle appelle, concernent toute l’activité scientifique en des termes interdisciplinaires. Chaque discipline peut se les approprier, dès lors qu’elle le fait intelligiblement en un même langage substrat, et qu’elle explicite la légitimation épistémique des propositions qu’ainsi elle construit. Et elle concerne aussi toute activité humaine collective, qui ne peut jamais s'enfermer durablement dans une stricte division du travail (qui est aussi division des travailleurs), et qui ne peut s'exprimer qu'en termes d’interactions”. 

Si tout ça s’effectuait, nous serions dans la situation que je proposait en 2000 dans un article en deux parts intitulé ”Université doit former des généralistes”. Mes thèses principales dans cet article étaient que (1) le nouveau paradigme à venir sera par nécessité holistique, (2) il se basera sur l’ontologie adéquate et sa langue unifiée, et (3) la théorie centrale unifiante sera probablement celle de la conception. Une dizaine d’années avant j’avait mis en route le développement de l’ontologie PSSP. Sa langue unifiée donnait pour la première fois la possibilité de produire des modèles holistiques intégrant la connaissance des artéfacts et celle des activités de l’homme et de prendre le premier pas vers la théorie générique de conception. Mais tout avancement jusqu’ici au cadre de ”la science de complexité”, incluant le succès de la théorie de chaos, n’est que de petits pas à côté du défi total de la complexité de la réalité.

La réalité dans sa totalité est créative. Autrement dit, la réalité produit spontanément sans cesse de nouvelles structures et phénomènes qui sont imprévisibles. Cette émergence restrain sérieusement l’utilité de réductionnisme et déterminisme, mais au même temps, dans sa créativité, elle tente à ruiner la nécessité d’un créateur surnaturel imaginé dit le Dieu. La réalité n’est pas homogène. Ontologiquement la réalité est nécessairement modulaire et hiérarchique.

Il y a des niveaux où les idées de réductionnisme et déterminisme sont bien valides comme témoigne le succès des projets spatiales: l’envoi d’une sonde et sa pose avec précision au surface d’un corps céleste se base sur les lois de Newton. Tout ça, malgrè très compliqué, est pourtant déterministique et ainsi pas complexe. Au même temps la biosphère est continuellement l’objet de l’évolution. Elle est complexe en conséquence de l’émergence qui s’exerce via la variation et la sélection, surtout des protéines capables de se reproduire. 

La marche triomphale de la science newtonienne aveuglait la communauté scientifique tant que peu à peu la modèle simplifiée de la réalité devenait l’ontologie même. Au même temps le niveau de réalité ignoré, celui-ci où demeure la complexité, était longtemps laissé ouvert pour la mystification, une source d’inspiration bien exploitée dans les domaines de l’art et de la religion. Aujourd’hui la réduction anticipée de cette espace menace de faire le Dieu une espèce en voie de disparition. Le pionnier de la théorie de complexité, Stuart Kauffman, propose dans son livre ”Reinventing the Sacred”, 2008, la redéfinition des termes Dieu et Sacré. ”Dieu” faisant référence à une construction théorique inventé par l’homme et ”Sacré” à quelque chose de divine, c’est à dire, à ce qui vient de Dieu, ainsi aussi bien inventé par l’homme, pourraient été donné de nouvelles connotations surgissant de la créativité de réalité.

Mais quelles sont les chances de succès de l’homme en attaquant la complexité de réalité? Est-ce que c’est face à l’émergence quand l’homme est enfin obligé d’avouer son insuffisance? Kari Enqvist, physicien et cosmologiste, prend la position dédramatisante à l’égard de l’émergence en tant qu’obstacle infranchissable. Pour lui le terme ne signifie que l’insuffisance de la modèle formelle spécifique adoptée (”effective model”) qui s’élimine par la révision de la modèle. Francis Heylighen, cybernéticien, a publié la taxinomie des types d’émergence en 1991. Il argumente que pour décrire l’émergence on doit recourir à la métamodèle dont la fonction est de contrôler la transition d’une modèle à l’autre représentant des variations retenues.

L’homme, un composant de la biosphère, possède la capacité unique, ainsi distinctive, de changer la réalité de façon consciente. C’est à dire, il a la capacité de concevoir. La conception se base sur la raisonnement déductive et inductive, comme fait l’analyse, mais en particulier sur la raisonnement abductive qui avance à l’envers, de l’effet à la cause. L’abduction a la caractère d’une course d’orientation dans un terrain inconnu avec la carte qui n’a que les courbes de niveau mais aucune information concernant la biodiversité de la végétation. Pour l’orienteur chevronné, faisant confiance à son intuition et créativité, une telle course n’est qu’une experience passionnante: il réussi de trouver son trajet qui n’est pas théoriquement optimal mais pas loin de là. Concepteur est capable de prévisions cultivés.

Comment formellement intégrer l´homme et son environment, c’est la question fondamentale de la théorie générique de conception. Il y a une vingtaine d’années j’en résumait mes idées en la modèle que j’appelle la cercle de conception (design cycle). Simplement exprimé, c’est la modèle dynamique de la conception de n’importe quoi. Ainsi, c’est aussi la modèle pour concevoir la modèle de l’émergence. Ainsi dit, je conclure que l’apprivoisement de la complexité de réalité semble possible. Au même temps il est sage de s’apprêter à l’émergence des surprises.